Édité en anglais, puis en français par les Éditions du Centre Pompidou, avec le concours de la Fondation Almayuda, « Structures De Domination Et De Démocratie » est bien plus qu’un catalogue d’exposition ou un beau livre de photographies. C’est un témoignage engagé, magnifique et irremplaçable, sur l’Afrique du Sud, son histoire, sa géographie et ses habitants, par le plus grand photographe de son pays.

Né en 1930, David Goldlatt commence la photographie à l’adolescence et traverse, l’objectif à la main, toute l’histoire contemporaine de son pays, de la mise en place de l’apartheid, structure de domination absolue, jusqu’à l’avènement de la démocratie.

Homme clef de la photographie sud-africaine, il est l’un de ceux qui a été le plus influencé par une histoire personnelle singulière, tirant ses racines de la vieille Europe, très loin de son Transvaal natal. Enfant d’une famille d’immigrés juifs lituaniens fuyant les persécutions, il est élevé dans un esprit d’égalité, de respect et de tolérance vis-à-vis des personnes d’autres cultures et d’autres religions. Dans sa maison natale, remplie de livres, les différences d’opinions se discutent. De là vient sa curiosité et sa volonté de comprendre, plutôt que de condamner les attitudes qu’il ne partage pas.

Retour au noir et blanc

« Peu importe qu’il photographie les noirs, les blancs ou les gens de couleurs, il le fait avec le même respect, la même curiosité, sans jugement et sans artifice ». Karolina Ziebinska-Lewandowska

Ses premières photographies, réalisées entre 16 et 18 ans, représentent des dockers, des pêcheurs, des mineurs.

Cela ne s’arrêtera plus, David Goldblatt sera le photographe documentaire de son pays. Il fixera sur sa pellicule la vie quotidienne des noirs opprimés, mais aussi celle des « petits blancs », paysans afrikaners parfois à peine mieux lotis. Il saisira la classe moyenne urbaine dans un mode de vie qu’elle croit immuable… Tout cela compose un voyage fascinant, émouvant et dérangeant, de faubourgs en townships, de champs poussiéreux en baraquements ouvriers…

Premier photographe sud-africain exposé au MOMA (New York – USA), lauréat du Hasselblad Award (2006) et du prix Henri Cartier-Bresson (2009), David Goldblatt est aujourd’hui considéré comme l’un des photographes majeurs du 20e siècle. Au printemps 2018, peu de temps avant sa mort, le Musée National d’Art Moderne – Centre Pompidou lui a consacré une rétrospective. L’occasion de publier en français, sous la direction de la Commissaire de l’exposition Karolina Ziebinska-Lewandowska, « Structures De Domination Et De Démocratie », qui retrace l’ensemble de son œuvre.

On y retrouve notamment la série « On the mines », cosignée avec Nadine Gordimer, la grande dame de la littérature sud-africaine disparue en 2014. Devenue une œuvre emblématique de l’histoire de la photographie documentaire, elle est présentée avec des tirages de travail.

David Goldblatt a travaillé en noir et blanc jusqu’à la chute de l’apartheid. Il est alors passé à la couleur parce que l’espoir était là. Puis il est revenu au noir et blanc, car il a eu à nouveau besoin de ce filtre pour regarder « notre nouvelle époque, celle d’une démocratie précaire, qui rappelle tant celle de la domination ! »

Disparu le 25 juin 2018, quelques semaines après la clôture de son exposition parisienne, David Goldblatt restera, pour l’éternité, le grand témoin visuel de la tragédie sud-africaine.

David Goldblatt – Structures de domination et de démocratie
Sous la direction de Karolina Ziebinska-Lewandowska
Editions Steidl / Éditions du Centre Pompidou – 2017
Photos David Goldblatt

Liens utiles :
goodman-gallery.com
www.centrepompidou.fr